Politique

Réforme des pensions : "Il est temps de travailler, mais pas seulement avec les recettes de la droite", affirme Karine Lalieux (PS)

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Par V. de Thier sur base d'une interview de T. Gadisseux

À un an des élections, le débat politique sur la fameuse réforme des pensions promise dans l’accord du gouvernement fédéral s’enlise. Gauche et droite ne parviennent pas à trouver un accord. La ministre à la manœuvre, Karine Lalieux (PS), déplore ce jeu de "cache-cache" entre les partenaires de la majorité et appelle à un coup d’accélérateur, avec l’ouverture de réelles discussions sur cette réforme. "Je ne peux pas vous dire ce qui fait l’objet d’un blocage autour de la table du gouvernement puisque nous n’en avons pas discuté", déplore-t-elle.

Surtout, la ministre fédérale des Pensions pointe la "petite musique dissonante " de la droite qui veut imposer ses réformes. "Les recettes de la droite ne sont pas les bonnes. Elles attaquent les travailleurs, les femmes, le pouvoir d’achat des pensionnés pour obtenir une solution pour la soutenabilité financière de nos pensions", estime-t-elle. "J’ai fait des propositions pour soutenir les travailleurs, garantir plus d’égalité entre les hommes et les femmes, ainsi que plus de solidarité entre les hautes et les basses pensions."

Selon la ministre, il y a aujourd’hui une proposition claire sur la table "qui rassure l’Europe, assure une soutenabilité financière mais aussi sociale, et qui rassure les travailleurs". "Il est temps de travailler, mais pas seulement avec les recettes de la droite. Ce ne sera pas une réforme de la droite, ce sera une réforme équilibrée dans le cadre d’un compromis à sept partis", promet-elle.

Le bonus pension, la solution ?

Parmi les pistes proposées par la ministre Lalieux, il y a le "bonus pension". Concrètement, si une personne travaille plus longtemps que ce qu’elle ne doit, elle reçoit un forfait quand elle arrête de travailler. Le projet prévoit d’accorder l’équivalent d’un complément de pension de 2 euros brut par jour à celles et ceux qui, pouvant partir à la retraite anticipée – après 42 ans de carrière - choisissent de prolonger leur carrière de maximum trois ans. Le bonus serait versé en une fois, à l’échéance, sous forme de capital. Celui-ci représenterait un montant net de 22.645 euros, en cas de prolongation de trois ans.

"L’Espagne a fait ce type de réforme. Elle a été validée par la Commission européenne. Cela incite beaucoup plus de personnes à travailler un peu plus longtemps parce qu’ils en ont les capacités. Au total, cela diminue le coût du bonus et des pensions, donc c’est très positif", développe la ministre. "C’est important pour valoriser le travail."

Ce mécanisme représente cependant un coût important pour les finances publiques, comment y faire face ? "Le problème des finances est résolu car le bonus pension est neutre budgétairement. C’est un capital net que les gens reçoivent, et c’est un incitant plus positif que les deux euros par jour de travail supplémentaire. Plus de gens vont rester au travail, vont cotiser et ne prendront pas leur pension aussi tôt. Le coût des pensions va donc diminuer", explique Karine Lalieux. "Cela a été calculé par le Bureau fédéral du Plan, qui dit que c’est une très bonne idée."

Réduire les inégalités d’accès à la pension

Un grand marqueur de ce gouvernement porte aussi sur les pensions minimales. Actuellement, la pension minimum complète est possible après 30 ans de carrière, mais son accès reste plus flou. "Aujourd’hui lorsque vous avez des carrières mixtes, que vous êtes fonctionnaire, puis indépendant, puis salarié, il est difficile d’avoir accès à la pension minimum car on ne calcule pas toutes les années de carrière", explique la ministre socialiste. "Ici, le but est de calculer l’ensemble des années de carrière quel que soit votre statut. Tout le monde pourra avoir accès à cette pension minimum après 30 ans de carrière."

Mais ce calcul des années effectives fait aussi débat entre les partenaires de la Vivaldi, notamment en ce qui concerne le cas des femmes qui interrompent leur carrière pour cause de grossesse ou qui sont contraintes de travailler à temps partiel. "Il faut protéger les femmes dans le cadre de l’accès à la pension minimum", déclare Karine Lalieux. "Tous les congés qui sont associés à la venue d’un enfant (congé de maternité, congé d’adoption, congé d’allaitement, congé d’écartement) doivent être considérés comme du travail effectif. Je veux diminuer les inégalités entre les hommes et les femmes. Je l’ai toujours dit, il n’y aura pas de réforme qui augmente ces inégalités."

"Ma proposition répond aux demandes de l’Europe"

En attendant, l’Europe bloque des montants du plan de relance car la Belgique ne parvient pas à s’accorder sur cette réforme. Au point que notre pays a dû emprunter pour financer des projets qui étaient validés par le plan de relance, faute d’argent européen.

"Qu’est-ce qu’on attend", martèle la ministre Lalieux. "Ma proposition positive pour les travailleurs répond à ce que demande l’Europe, c’est-à-dire une soutenabilité financière. […] J’ai des discussions avec le Premier ministre mais, ce que je ne veux pas aujourd’hui, c’est qu’on me dise que soit on impose une politique de droite dans la réforme des pensions, soit il n’y a pas de réforme des pensions."

Le ton est donné. Pour sortir de cet immobilisme, les partenaires de la majorité devront se mettre à table.

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