Europe

À un an des élections en Belgique, la droite a le vent en poupe en Europe

Les derniers résultats électoraux en Europe ont été favorables à la droite

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Par Olivier Hanrion

C’est une vague qui prend de l’ampleur en Europe : élections après élections, la droite européenne gagne du terrain. C’est la Suède qui a ouvert le bal, le 11 septembre dernier. Lors des élections législatives, à l’issue d’un scrutin très serré, les Démocrates de Suède, un parti conservateur et nationaliste issu de la mouvance néonazie, s’allient à la droite modérée pour chasser le parti social-démocrate du pouvoir. Un choc. Si officiellement la droite radicale choisit de rester à l’écart du pouvoir, c’est bien elle qui tire les ficelles du gouvernement.

Deux semaines plus tard, rebelote en Italie cette fois. Une coalition allant de la droite traditionnelle (Forza Italia) à l’extrême droite (La Ligue) en passant par les conservateurs de Fratelli d’Italia (ancien parti néofasciste), s’impose aux élections législatives du 25 septembre. Giorgia Meloni, cheffe de file de la droite radicale italienne, assume sa victoire et devient Présidente du Conseil.

Puis il y a eu la Finlande en avril 2023, la Grèce en mai et enfin la victoire surprise de la droite et de l’extrême droite espagnole aux élections régionales et locales du 28 mai dernier. La droite européenne marche sur un nuage.

Le retour du conservatisme

Bien évidemment la situation politique dans chacun de ces Etats membres n’est pas comparable.

Cependant, Nathalie Brack, professeure au Centre d’Etude de la Vie Politique (CEVIPOL) de l’ULB et professeure invitée au Collège d’Europe, estime que la multiplication des crises que l’Union européenne a traversées peut être l’un des facteurs qui explique cette poussée dans les urnes.

"La crise sanitaire, la crise énergétique, la crise inflationniste, la crise climatique ou la guerre en Ukraine, toutes ces crises qui se succèdent voire se superposent, inquiètent une partie de la population. Elles plongent les citoyens dans un océan d’incertitudes. Dans ce contexte, le réflexe d’une partie des électeurs est de se tourner vers une certaine forme de conservatisme. Et le conservatisme, c’est précisément l’un des marqueurs traditionnels de la droite. Face aux bouleversements, les citoyens préfèrent l’option du statu quo", explique la politologue.

L’environnement, première victime de la droitisation de la vie politique en Europe

Un phénomène que l’on observe notamment autour des enjeux environnementaux. Aujourd’hui, la droite traditionnelle tire le frein à main sur toute une série de politiques de protection de la biodiversité, comme la très contestée loi sur la restauration de la nature, et demande une pause réglementaire.

En Suède, l’un des premiers gestes du gouvernement de Ulf Kristersson aura été de supprimer le ministère de l’environnement et du climat. Une première depuis 1987 ! En Italie, le gouvernement Meloni va un pas plus loin et s’oppose carrément à la fin des véhicules thermiques en 2035.

Enfin, au Parlement européen, le PPE, la grande famille politique de centre droit, n’hésite plus à s’allier avec les groupes de la droite radicale et de l’extrême droite pour saborder le Pacte vert, le projet phare de la Commission européenne…

Déclic

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La lutte contre l’immigration

La lutte contre l’immigration est l’autre ferment qui explique cette poussée de la droite en Europe. "Traditionnellement, c’est une thématique fétiche de l’extrême droite, analyse Nathalie Brack, mais elle est aujourd’hui exploitée par une partie de la droite traditionnelle, voire au-delà : c’est grâce à une politique migratoire très dure que la gauche danoise s’est maintenue au pouvoir en novembre dernier".

En parallèle, ce flou artistique est entretenu par le fait que les partis d’extrême droite ont de leur côté adouci les positions antieuropéennes qui ont longtemps été les leurs. L’extrême droite se banalise dans le discours européen au point que de nombreux dirigeants conservateurs en Europe estiment avoir gagné la bataille des idées.

Droite traditionnelle vs droite radicale, qui va rafler la mise ?

A un an des élections européennes, le baromètre de la Fondation Konrad Adenauer montre que c’est surtout la droite radicale, une droite nationaliste, conservatrice, qui pourrait profiter du renouvellement des eurodéputés. "Face à cette concurrence sur sa droite, la droite traditionnelle doit modifier ses idées, analyse Nathalie Brack. Aujourd’hui le PPE est profondément divisé sur la question de savoir ce que cela représente d’être de droite, notamment sur les questions liées à l’immigration. Sans aggiornamento, c’est leur survie qui est en jeu".

Les prochains rendez-vous électoraux sont nombreux : en Espagne (juillet 2023), en Pologne (novembre 2023), en Belgique et en Europe (juin 2024). Ils permettront de voir quel type de droite prendra le pas sur l’autre.

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