Le Palais de Justice est l'un des bâtiments emblématiques de Bruxelles. Mais voilà des dizaines d’années que l’on ne peut plus admirer pleinement sa monumentale architecture. Des échafaudages, autour de sa coupole et de sa façade principale, le défigurent encore et toujours. Ceux qui se souviennent de lui sans ce fatras de planches et de ferrailles sont de plus en plus rares. L’état belge affirme avoir débloqué des budgets pour enfin le rénover. Alors, aperçoit-on aujourd’hui la fin des travaux forcés à perpétuité auxquels semblait, jusque-là, condamné le Palais ? S’agit-il seulement du début la fin ou de la fin du début ? La réponse est nuancée.
Si le grand architecte Joseph Poelaert revenait parmi nous, il faudrait à coup sûr redouter sa rage et son courroux face au martyr que la Belgique fait subir à son chef d’œuvre. Un bien douloureux et long supplice. Car voici bientôt quatre décennies que le Palais de Justice est emprisonné dans un sarcophage d’acier. Il s’agit d’un double échafaudage géant. Le premier tout autour du tambour de la coupole centrale et le second devant la façade principale. Le comble dans cette histoire est que la forêt de tubes métalliques n’a pas servi à grand-chose puisque les travaux de restauration n’ont jamais vraiment débuté. Pourtant l’Etat belge a continué à louer ces échafaudages au prix fort, pour finalement… les racheter. Entre location et acquisition, le tout a coûté la bagatelle d’un million et demi d’euros.
La faute à qui ?
La préservation et la restauration du Palais Poelaert, c’est le devoir de son propriétaire. Il s’agit de l’état belge et de son bras armé, la Régie des Bâtiments. Cet organisme public est en charge de tous les biens immobiliers de l’Etat. Cela va des prisons jusqu’au Palais royal en passant par le Cinquantenaire. Cela concerne plus de 900 complexes immobiliers. Soit près de 7 millions de m2 à gérer. Une mission dans laquelle de hauts fonctionnaires de la Régie ont franchi la ligne rouge. Une vingtaine ont ainsi été condamnés à de la prison ferme pour des faits de corruption. Ce scandale qui remonte aux années '80 et '90 concerne aussi le marché des… fameux échafaudages du Palais de Justice.
Cette sombre page qui éclabousse la Régie appartient à une autre époque. En 2008, la maison a été reprise par Laurent Vrijdaghs. Et cet ingénieur civil, pur produit de l’Ulb, a eu fort à faire pour remettre de l’ordre dans la demeure. Et pendant ce temps, le chantier du Palais Poelaert n’a guère avancé. En fait, depuis l’avènement de l’ère Vrijdaghs, la priorité a été mise sur la sécurité du bâtiment et des personnes qui y travaillent et qui le fréquentent. Et il y avait de quoi redouter le pire en cas d’incendie. Aucun système de détection digne de ce nom, pas de plan d’évacuation, absence de coordination avec les pompiers, alimentation totalement insuffisante.