Belgique

"10% des pensionnés ne payent plus leurs impôts en Belgique" : Vrai ou faux ?

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Par Arnaud Ruyssen

C’est une petite phrase qui n’est pas passée inaperçue dans le dernier épisode du PODCAST "Déclic – Le Tournant": le professeur de l’UCLouvain, Jean Hindriks, pointait le sort des pensionnés belges qui partent vivre leur retraite à l’étranger et le manque à gagner pour le fisc belge.

"On a 10% de nos pensionnés qui sont exilés, remarque le spécialiste en finances publiques, c’est-à-dire qu’ils vivent à l’étranger, qu’ils reçoivent une pension de l’Etat belge, de notre sécurité sociale mais ne payent plus d’impôts chez nous. Ils ne contribuent plus à la sécurité sociale, ne versent plus de TVA, mais peuvent toujours profiter de la sécurité sociale, c’est-à-dire que s’ils ont des problèmes de santé, ils peuvent revenir en Belgique se faire soigner, remboursés par la sécurité sociale. C’est le genre de choses sur lesquelles il faut se poser des questions, dans un contexte où les finances publiques sont comptées."

Des recettes TVA qui s’échappent

Alors, est-ce vraiment le cas ? D’abord sur les chiffres : on est effectivement dans cet ordre de grandeur. Selon les dernières statistiques complètes du Service Fédéral des Pensions, publiées en 2020, un peu plus de 200.000 pensionnés avaient fait le choix d’aller vivre leur retraite à l’étranger soit, 9,21% du nombre total de pensionnés. On est donc proche, en effet, des 10%. Et le phénomène est en plein boum : dix ans plus tôt, ils n’étaient que 40.000 à faire ce choix.

Peut-on considérer qu’ils ne payent plus d’impôts chez nous ? En réalité, tous les pensionnés vivant à l’étranger ne sont pas logés à la même enseigne, comme l’avait très justement démontré l’Echo dans un article réalisé en 2020. Les pensionnés de la fonction publique restent toujours imposables en Belgique mais ce n’est pas le cas des salariés et des indépendants.

Pour eux, le prélèvement se fait le plus souvent dans le pays de résidence, sauf si ces pays ont conclu des conventions spécifiques avec la Belgique : c’est le cas des pays limitrophes (Allemagne, Pays-Bas, Luxembourg, Royaume-Uni) mais ce n’est pas le cas de la France, de l’Espagne, ou encore de l’Italie qui à eux trois attirent plus de la moitié des pensionnés belges. Un pays comme le Portugal a d’ailleurs fait le choix politique d’attirer les pensionnés étrangers sur ses terres en leur appliquant une flat-tax assez faible durant les 10 premières années de séjour.

Reste la TVA. Les petites et moyennes pensions n’étant pas fortement imposées (elles sont soumises au précompte professionnel, mais seulement à partir d’un certain plancher, 16.000 € pour un isolé. Et pour la cotisation de sécurité sociale, on prélève 3,55% du montant brut mais seulement quand les revenus dépassent un certain seuil : 1962,33 euros pour les ménages et 1655,77 euros pour les isolés), c’est surtout via la consommation et le payement de la TVA que les pensionnés contribuent aux finances publiques. Sur ce point-là, comme ils consomment sur leur lieu de résidence, ce sont donc bien des recettes potentielles qui échappent à la Belgique, du moins tant qu'elle n’attire pas autant de pensionnés étrangers sur son sol.

Si vous voulez prendre le temps d’y voir plus clair sur cet enjeu des finances publiques, écoutez les 45 minutes de ce nouvel épisode du PODCAST "Déclic – Le Tournant", sur Auvio et sur toutes vos plateformes de téléchargement.

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